La campagne électorale s’achève, et il reste encore une notion à explorer, régulièrement brandie par d’autres organisations syndicales comme un argument massue pour faire comprendre à l’électorat à quel point ils sont légitimes : l’autonomie.
Pour cette élection, deux organisations syndicales se revendiquent autonomes, contre les deux autres qui seraient pilotées par leur centrale. Leur autonomie, ce serait donc leur faculté d’agir librement, en toute indépendance, sans se revendiquer des valeurs d’un syndicat national.
Pour représenter les salariés, nous avons choisi la CGT pour plusieurs raisons. Pour l’historique fort de ce syndicat, pour leurs luttes et leur représentation de toutes les strates de la société (du chômeur au retraité en passant par les travailleurs sans-papiers) mais aussi pour leurs valeurs : « la démocratie, le respect d’autrui et la défense des intérêts de tous les salariés en tous temps et tous lieux ; la lutte contre toute forme de discrimination, racisme, xénophobie, anti-féminisme et toutes les exclusions ; l’égalité femmes /hommes, la liberté des droits syndicaux et l’exercice de la citoyenneté et la défense de l’environnement. »
En tant que section syndicale, nous faisons parti d’un regroupement plus vaste, l’Union Syndicale CGT Commerce, qui regroupe plusieurs sections syndicales des grandes (ou plus petites) entreprises du commerce. Cela permet de garder un oeil sur toutes les pratiques des autres employeurs, sur les luttes en cours et les avantages acquis dans les entreprises du secteur.
Est-ce que la CGT intervient sur nos négociations ? Non. Nous sommes libres de signer ou non ce que l’on veut. Nous portons les revendications que nous voulons, en provenance des salariés, sans conseil ou ordre de la CGT. Par contre, contrairement à d’autres, nous ne prétendons pas avoir la science infuse. Bâtir un accord d’entreprise nécessite de passer par tout un jargon et des petites lignes qui peuvent avoir des conséquences énormes sur la vie des salariés si nous ne savons pas les déchiffrer correctement. C’est là que la CGT est très importante pour nous, forte de son expérience dans la négociation d’un grand nombre d’accords. Ils mettent à notre disposition leurs connaissances juridiques, et même l’aide d’un cabinet d’experts en droit du travail et économie de l’entreprise, une ressource précieuse qui met en lumière pour nous les mécanismes particuliers du fonctionnement d’Apple Retail France.
Deux exemples concrets de ce que cela veut dire :
–Lors de la négociation pour l’ouverture des magasins le dimanche en Zone Touristique Internationale, le syndicat majoritaire a déposé une proposition de rémunération du dimanche à 165%, puis la direction a surenchéri sur 175%. De notre côté, nous nous sommes tournés vers notre centrale syndicale pour savoir quels accords étaient négociés ailleurs (FNAC, BHV,…) sur l’ouverture du dimanche. Ainsi, nous avons bien vu qu’Apple proposait une compensation largement inférieure aux entreprises du secteur, et nous avons pu pousser pour faire remonter les enchères.
-Lors de la négociation du Protocole d’Accord Pré-électoral, qui a pour but d’encadrer ces élections professionnelles 2019, nous avons pu amener un représentant de notre syndicat pour nous aider sur les notions légales de l’accord. La CFDT a fait de même, mais les deux autres organisations syndicales sont venues à la table en toute « autonomie ». Résultat, la CFDT et nous-mêmes avons construit cet accord. Pire, nous avons appris que lors des élections de 2014, les syndicats à l’époque ont laissé les Store Leaders voter. Or, il est interdit légalement pour l’employeur ou son représentant (ici le store leader, ou toute personne qui a délégation de pouvoir de l’employeur pour embaucher, licencier ou mener des réunions de délégués du personnel) de voter – ce qui est bien normal – pour les représentants des salariés. Comme la direction et le syndicat majoritaire voulaient de nouveau faire voter les store leaders, nous avons donc pu nous y opposer en nous appuyant sur les textes légaux.
Ces exemples pour bien montrer que faire partie d’une organisation syndicale nationale ayant l’expérience et les moyens juridiques est pour nous indispensable pour avoir tous les outils nécessaires à la négociation, mais aussi à la défense et à la représentation des salariés. C’est pour nous un socle sur lequel s’appuyer, avec qui nous apprenons sans cesse et qui nous aide à ne pas tomber dans les pièges du dialogue social, dans lequel jamais le salarié ne sera à égalité avec l’employeur.